Comme lors de chaque nouveau conflit social d’importance ou de nouvelle mobilisation qui emmènent dans leurs sillages des millions de participant.es, les manifestant.es, tout comme l’ensemble des citoyen.nes de ce pays, épris de justice sociale et soucieux du respect des libertés fondamentales, découvrent ou redécouvrent, avec effarement et colère, la réalité des actes de violences policières systémiques qui gangrènent littéralement les forces de l’ordre.
Et la colère est d’autant plus grande en raison des conditions d’arbitraire et d’impunité qui accompagnent généralement les nombreux crimes et délits commis dans ce contexte de fortes mobilisations, par les différentes forces de police engagées dans la répression du mouvement social (Coups et blessures, mutilations, humiliations, injures, procédures injustifiées, faux en écriture publique et faux témoignages). Comme si la violence sociale de la remise en cause par l’État des droits acquis et les régressions qu’elle engendre devaient nécessairement s’accompagner d’une mise au pas à coups de triques, de charges policières, de blessures, de gazage et de gardes à vue, remettant gravement en cause le droit de s’exprimer et celui de manifester.
Depuis une dizaine d’années et la généralisation des technologies numériques à la portée de toutes et tous, les enregistrements de ces violences et leur diffusion alertent régulièrement (et en temps réel) sur ces actes répréhensibles et indignes d’une démocratie. Pour autant, entre le défaut de numéro RIO sur les uniformes et les visages dissimulés par des cagoules, une partie des forces de l’ordre organise l’impunité ou, à tout le moins, tente par ce biais de brouiller les pistes des enquêtes qui pourraient être diligentées à leur encontre.
Dans les faits, le suivi des affaires de violences illégitimes et de crimes policiers se terminent pour une grande part d’entre elles par le classement sans suite, le non-lieu ou des peines assorties de sursis qui ne remettent pas en cause l’appartenance de ces délinquants aux différents corps de police. Sans compter (c’est le moins qu’on puisse dire) avec l’organe de contrôle interne – l’IGPN – qui est à la fois juge et partie.
Ces « mauvaises manièrespolicières », comme il les qualifiait avec ironie, Maurice Rajsfus les a d’abord recensées et documentées, durant plus d’un demi-siècle, en en constituant un fichier à partir de 1968, puis analysées et dénoncées dans de très nombreux livres ainsi qu’au travers de l’Observatoire des Libertés Publiques, éditeur, du printemps 1994 jusqu’à celui de 2014, du bulletin mensuel Que fait la police?
À travers ces activités éditoriales sans relâche, il a cherché à comprendre les raisons de ces dérives érigées en fonctionnement habituel de l’appareil policier, en remontant le fil de l’histoire de cette institution répressive, objet de toutes les attentions des différents régimes au pouvoir.
L’Association des Ami.e.s de Maurice Rajsfus s’est attachée, depuis sa création en 2021, à rééditer ses principaux livres, dont deux sur la police, au printemps 2021 :
- La police de Vichy. Les forces de l’ordre françaises au service de la Gestapo (1940-1944), avec une préface inédite de Arié Alimi.
- 1953: un 14 juillet sanglant, avec une préface inédite de Ludivine Bantigny et la reprise de la postface de Jean-Luc Einaudi.
Pourquoi ces deux livres, parmi la vingtaine de titres consacrés, par Maurice Rajsfus, aux faits et méfaits de la police ?
Parce qu’ils permettent notamment de comprendre que les structures et le fonctionnement de l’appareil policier remontent… à Vichy, même si leur fonction fondamentale de défense d’un ordre social injuste était déjà le même au cours des périodes précédentes.
Et aussi parce que le massacre d’État (bien évidemment non reconnu comme tel) du 14 juillet 1953, visant le cortège des Algériens intégrés à cette grande manifestation populaire, prémisses d’autres massacres d’État perpétrés par la police parisienne le 17 octobre 1961 et le 8 février 1962, au métro Charonne, contient tous les ingrédients détestables de notre police « républicaine » : racisme systémique, violences illégitimes, domination des citoyens, sentiment de puissance, arbitraire et impunité.
Une coédition Éditions du Détour/Association des Ami.e.s de Maurice Rajsfus
Pour nous écrire: ami.e.s_mauricerajsfus@laposte.net
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